mercredi 11 janvier 2012

Trintignant joue à Avignon : "Je me sens anarchiste !"

Dans le feuilleton Bertrand Cantat, Trintignant avait annulé sa venue au Festival d'Avignon. Il revient samedi dans la cité des papes avec le même spectacle.
- Qu'est-ce qui fait la singularité de ce spectacle ?
Jean Louis Trintignant : Il est chaleureux, triste, gai, émouvant. Le metteur en scène m'a laissé choisir les textes. De tous les spectacles que j'ai pu faire, c'est celui que je préfère parce qu'il est beau et populaire. Autrefois, j'ai fait des choses un peu élitistes.
- Heureux de jouer dans le Sud où vous vivez ?
JL.T. : Oui, je suis très attaché à Aix où j'ai vécu à la fin des années 40. J'y ai fait un peu de droit juste avant de partir à Paris. J'allais souvent à Marseille où j'ai pris, au Gymnase, mes premiers cours de théâtre. Je n'y connaissais rien, j'étais enchanté.
- Prévert, Vian, Desnos, qu'ont-ils en commun ?
JL.T. : L'unité entre eux, c'est l'anarchie. Les trois ont le même esprit : ils parlent légèrement des choses graves. Ils aiment la vie, les gens, ils sont généreux. Je suis d'accord avec tout ce qu'ils disent. Dans un poème, Vian dit "faites ça, faites ci, faites ça, et si vous n'y arrivez pas vous n'avez qu'à vous suicider". C'est fabuleux de dire ça parce que c'est terriblement vrai. Mais à côté de ça, Vian et les deux autres sont de grands amoureux. Ils ont cet amour de l'amour même si c'est douloureux.
- Vous l'êtes aussi, un grand amoureux, non?
JL.T. : Oui. Ma fille Marie était une grande amoureuse. Elle est morte d'ailleurs à cause d'un type qu'elle a sûrement beaucoup aimé. Moins les derniers temps de sa vie. Elle aurait pu rester tranquille avec ses quatre enfants et, à cause de l'amour, elle est allée se foutre dans un sale truc. Mais l'amour vaut toujours la peine d'être vécu.
- En 2011, vous avez annulé votre venue à Avignon (Ndlr: Bertrand Cantat devait aussi participer à un spectacle du festival). Vous le referiez ?
JL.T. : Oui. Je ne me sentais pas d'être au Festival d'Avignon en même temps que l'assassin de ma fille. Mais j'espère y être en 2012. J'aimerais jouer dans la Cour d'honneur, c'est tellement beau.
- Après l'Opéra d'Avignon, allez-vous vous accorder de petites vacances ?
JL.T. : Peut-être même des grandes ! C'est déjà formidable de profiter, si vieux, de ce merveilleux métier. J'ai beaucoup de chance de jouer à 80 ans.
- Ça signifie que vous renoncez définitivement au cinéma ?
JL.T. : Je ne ferai plus de cinéma parce que je suis vieux et parce que j'ai le bonheur de jouer au théâtre. Mais j'ai tourné récemment avec Michael Haneke. Je pense qu'on va aller à Cannes avec ce film, "Amour", qui est très beau et très noir. Quand j'ai lu le scénario, je me suis dit que je n'irais pas le voir, alors le tourner devenait intéressant. C'est l'histoire d'un couple qui sombre dans la vieillesse.
- Comme les poètes de votre spectacle, êtes-vous anarchiste ?
JL. T. : Oui. J'ai été communiste puis j'ai eu la preuve que l'homme n'était pas prêt pour ça. Je ne suis pas violent, je suis contre l'autorité, la politique. Je suis un homme de gauche et je me sens profondément anarchiste.
Samedi à 20 h 30 à l'opéra-théâre d'Avignon. De 5,50 à 44 ; 04 90 82 81 40.

http://www.laprovence.com/article/a-la-une/trintignant-joue-a-avignon-je-me-sens-anarchiste-le-comedien-dit-vian-prevert-et-de

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