vendredi 21 janvier 2011

SPECTACLE Serge Lama, l'indéracinable

Sur scène, il est tel qu'il nous plaît : simple, proche, fidèle, indémodable. Serge Lama fédère toujours autant. Juste un accordéon et une guitare pour cet élégant tour de chant qui passe ce samedi par le Casino Barrière.


Vous nous disiez être incertain sur la durée de cette tournée. Deux ans après, vous êtes toujours sur les routes avec ce tour de chant. Qu'est-ce qui vous fait encore courir ?




>> L'envie ne m'a jamais quitté. Après, c'est le public qui nous donne la clé de la porte et nous permet de rentrer dans la maison. On est reparti pour un bon nombre de dates. Ce Tour d'horizons se terminera donc à la fin de l'année.


Vous êtes un adepte des longues tournées.
>> Je suis certainement un des chanteurs de ma génération qui a chanté le plus. Les Sardou, Julien Clerc font des Zénith tous les trois-quatre ans alors que moi je fais des concerts quasiment tous les ans depuis 1972.
Si je regarde derrière moi, c'est assez colossal.


Votre corps vous fait-il actuellement souffrir (il a gardé des séquelles d'un terrible accident de voiture survenu en 1965, ndlr) ?
>> Il est toujours dans le même état. Le jour où il ne suivra plus, je serai obligé de m'arrêter. Mon corps renâcle parfois et je suis contraint de faire plein de concessions pour lui. Mais jusqu'à présent - et je touche du bois - il ne m'a pas encore lâché.


Dans votre dernier album « L'âge d'horizons », pourquoi auscultez-vous frontalement le temps qui passe (« D'où qu'on parte », « J'arrive à l'heure ») ?
>> Je mets les choses à plat. À cause un peu des diktats de l'époque, les gens de ma génération ont une appréhension à parler de l'âge et du temps qui passe. On n'évoque jamais ces choses-là qu'ils peuvent éprouver. Des jeunes viennent aussi me voir et me disent qu'ils ressentent très fort ces chansons-là.


Se dévoile-t-on ou se cache-t-on derrière les mots ?
>> Les deux. C'est une logique de la vie : quand on se dévoile on se cache et quand on se cache on se dévoile. C'est comme le yin et le yang.


Vous êtes sur scène avec une formation guitare-accordéon. Qu'envisagez-vous d'explorer dans le futur ?
>> Je suis à l'heure où le futur c'est le présent. J'entends par là : j'espère vivre à chaque fois trois ou quatre ans de plus, ce qui me permettrait d'avoir un projet supplémentaire. Quand j'avais 20 ans, je voyais les choses de manière beaucoup plus étendue dans le temps. Si aujourd'hui on fait le compte, je dois admettre que je suis plus près du bout que de la fin (il a 67 ans, ndlr)
Avez-vous le culte du travail ?
>> Je suis un peu fainéant. Mais quand je me lance, je m'y mets vraiment. J'ai besoin certainement de cette forme de fainéantise pour sauter dedans et être mieux concentré. Dans les moments de silence ou de gestation, je fais finalement inconsciemment beaucoup de choses.


Si vous vous retournez sur le passé, qu'est-ce qui vous a résisté dans votre vie ?
>> Quelques femmes (rires).
Je pense que je n'ai pas réussi à ouvrir la porte du cinéma parce que je m'y suis mal pris ou trop tard. Peut-être pas pour devenir acteur à temps plein comme l'a fait Montand à une époque, mais disons comme Bruel ou Aznavour. Cela m'amuse beaucoup de jouer la comédie. Je l'ai fait au théâtre, un peu à la télévision, mais pas pour le cinéma. Il faut aller chercher les choses en France parce que les gens ne viennent pas vers vous, ils n'ont pas d'imagination.


Peut-on dire que vous avez une conception assez libre de l'amour ?
>> Oui et non. Les gens s'imaginent qu'on écrit des chansons autobiographiques, mais ce n'est pas toujours le cas. Par exemple, Je te partage, - une chanson qui a pas mal marché il y a quelques années - n'est pas tellement dans ma nature. Moi je ne suis pas parfait, ce serait vous mentir, mais en général quand je suis avec quelqu'un, je vis l'histoire sans écart.


Auriez-vous pu affronter la vie sans les femmes ?
>> Elles ont souvent été un appui pour moi. Et celles qui ne l'ont pas été, je les ai tout de suite repérées et je m'en suis séparé dans la foulée. Ma mère était très dominatrice, notamment avec mon père.
Elle a essayé avec moi mais elle n'y est pas parvenue. J'étais donc averti, dès l'enfance, que les femmes pouvaient être comme ça. Je me suis prémuni et j'ai refusé d'aller plus loin avec des femmes parce qu'elles m'auraient fait la peau. J'étais mieux avec celles qui étaient en accord avec mon équilibre psychologique et physiologique
Que vous ont appris les femmes ?
>> La patience. Elles savent attendre le bon moment.


Vous avez été un des premiers à parler d'érotisme dans les chansons...
>> Dans les années 50, Brassens en parlait d'une certaine façon. Gainsbourg a ensuite pris la relève. Après, j'en fais partie comme Aznavour. Sa chanson Après l'amour était révolutionnaire et a même été interdite à l'époque à la radio.


Vous chantez « Souvenirs, attention danger ». À prendre à la lettre ?
>> Les souvenirs, c'est bien quand on les conserve dans un coin de sa tête. Le problème, c'est lorsqu'on revient sur leurs lieux. On est souvent très déçu parce que rien ne ressemble à avant. Les souvenirs, ce sont les jouets des gens âgés. Ils peuvent aussi vous amener plutôt aux larmes qu'au rire. Il ne faut donc pas en abuser.


Croyez-vous à la postérité ?
>> Du tout. Je n'y crois pour personne d'ailleurs. Peut-être pour Newton même si on ne sait pas trop ce qu'il a fait à part une pomme qui lui est tombée sur la tête (rires). De temps en temps, il y a un refrain qui traverse les siècles. De toute façon, ce n'est pas très important. Ce qui l'est, c'est ce qu'on fait.


Êtes-vous du genre à annoncer vos adieux ou à partir sur un coup de tête ?
>> Honnêtement, je n'ai pas pris ma décision. Mes adieux peuvent me rattraper au milieu de ma course c'est-à-dire que je peux chanter sans savoir que c'était la dernière fois. On n'est jamais à l'abri d'un pépin.


Que pense-t-il politiquement, Serge Lama ?
>> Absolument rien. Je m'en tape. Comme les politiques, non ?


http://www.nordeclair.fr/Loisirs/Musique/sorties_disques_-_rencontres/2011/01/20/spectacle-serge-lama-l-inderacinable.shtml

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