vendredi 15 avril 2011

«20ANS magazine, Anthologie»: symbole d'une presse «pas pour les connes»

Un livre retrace l’histoire du magazine et republie les meilleurs articles de ce titre devenu mythique...
«La première fois que tu t’es fait caresser les seins par un garçon, tu as eu l’impression de vivre quelque chose d’unique, d’être une héroïne de Sade.» C'est ainsi qu' Eugène Mansfield expliquait la sexualité aux lectrices de 20 ans en avril 1995, et c'était tellement différent du reste de la presse féminine que quinze ans plus tard, une anthologie du magazine est publiée.

«Je hais les jeunes filles. 20ANS magazine, Anthologie», dans toutes les librairies ce jeudi, est une synthèse non exhaustive de cet ovni de la presse féminine des années 90 et du début des années 2000. Deux ans de travail coordonné par Marie Barbier aux éditions Rue fromentin pour réunir les meilleurs articles de la publication et interroger ceux qui l’ont fait «passer d’un magazine plan-plan à un laboratoire d’idées où des personnalités aussi diverses que
Michel Houellebecq ou Emmanuelle Alt ont contribué à la ligne du parti» précise Elise Costa, ex-lectrice, sur son blog.

«20 ans c’est cul»
20ans, dans les années 90, c’est tout le contraire des magazines «girly», préférant le cynisme, l’ironie. «Le discours du journal, dans tout ce qu’on faisait, c’était ne soyez pas connes les filles, faites vos études» témoigne Mael Le Deliou, rédactrice, dans le livre. Ils pouvaient publier une étude psycho-capillaire de Ophélie Winter pour décrypter son parcours sentimental et créatif, des horoscopes qui déconseillent l’écoute de la musique de Francis Lalanne ou une interview d’Albert Dupontel (que vous pouvez retrouver dans l’anthologie) dans laquelle le journaliste lui demandait s’il connaissait
Jacques Chirac. «20 ans, c’est cul», résume Pierre Yves Dodat, ex-membre de la rédaction.
Dirigé par Isabelle Chazot, alors jeune diplômée de la Sorbonne au début des années 90, c’est sur cette époque que se concentre le livre. 20 ans ne se soucie alors pas des annonceurs. Une rédaction de plumes qu’a interrogé l’éditrice du livre Marie Barbier. Avec beaucoup de mecs, le mag’ n’hésite pas à publier «Le marxisme expliqué aux jeunes» d’Alain Soral. Sa culture visuelle bazarde tous les codes, ça plaît aussi bien aux jeunes filles qu’à leurs copains ou leurs mères. «Si 20 ans peut développer un ton aussi original et éloigné des standards de la presse pour jeunes filles, c’est également parce que la rédaction fonctionne sans censure des actionnaires ni des annonceurs» explique l’ex rédactrice-en-chef.

Des lectrices groupies
Les lecteurs et lectrices, qui ont aujourd’hui la trentaine, s’identifient rapidement à la publication dont ils apprécient la fraicheur, l’idéal féministe, le pessimisme aussi.
L’anthologie suscite ainsi l’intérêt avant même sa sortie ce jeudi. «Je m'inspirais des articles d'Arielle Sarraco pour forger mon style en matière d'écriture, je me détendais avec l'humour cynique et tendre de notre Diastème national, et les explications du Dr Perlmutter étaient les plus perspicaces de toutes les explications psy.» Les lectrices comme Violett sont unanimes et expliquent, passionnées, à quel point aucun magazine n’a pu remplacer 20 ans. «Je rigolais en retrouvant les articles dont je me souvenais et que je voulais absolument dans le livre » précise Marie Barbier, confiant avoir fait le livre pour elle et sa petite sœur.
«On peut peut-être retrouver ce ton dans certains articles de Technikart aujourd’hui, mais ce n’est pas aussi marrants. Ponctuellement sur des blogs ou des sites aussi» explique l’éditrice. Il lui a fallu emprunter les collections des lectrices et aller à la BNF pour pouvoir consulter les numéros. «J’ai recherché des numéros mais c’était impossible d’en acheter, rien sur les sites de ventes en ligne.»

20 ans, 10 ans après
Après avoir disparu des kiosques en 2007, le magazine reparaît début 2009. Le titre s’aligne sur les titres existants, dans sa maquette, son ton. Les plumes des années 90 et l’humour ont disparu au profit d’
une équipe très jeune et réduite.
«20 ans est mort quand les éditeurs ont décidé unanimement de produire une presse consumériste et menteuse. (…) Le ton s’est affadi, banalisé, bébétisé», affirme Isabelle Chazot, aujourd’hui rédactrice en chef de FHM. Elle avait claqué la porte en 2003. Emportant «l’esprit 20 ans» et son lectorat avec elle. http://www.20minutes.fr/article/706637/media-20ans-magazine-anthologie-symbole-dune-presse-pas-connes

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